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Après avoir vu le film « Différente »

J’ai assisté à une projection du film « Différente », suivie d’un débat organisé par un groupe d’échange TSA adulte.
Ce film m’a profondément touchée et ramenée à mon propre parcours.

On y voit très bien comment la protagoniste est submergée par tous les bruits environnants (elle travaille en openspace) et n’arrive pas à s’en couper, contrairement à la plupart des gens.
Je me suis tellement reconnue là-dedans. Pour moi aussi, un environnement avec du mouvement et du bruit, même faibles pour d’autres, peut me rendre incapable de fonctionner.

Le film parle aussi des diagnostics tardifs chez les femmes, qui souvent camouflent mieux leur TSA.
Je m’y suis reconnue douloureusement : pendant 40 ans, sans diagnostic, j’ai accumulé les critiques, les remarques, les jugements sur mes différences.

Toutes ces petites phrases entendues…

« Pourquoi tu fais cette tête ? Souris un peu !»
« Pourquoi tu travailles par terre ? Tu as un bureau, tu vas avoir le dos tordu.»
« Tu dors trop ? Trop dormir fatigue, il faut dormir 8h par nuit.»
« Vas jouer avec tes camarades.»
« Tu ne parles pas assez, il faut montrer de l’intérêt, poser des questions.»
« Danse, ça fait du bien, tu iras mieux après ! Lâche-toi un peu !»
« Tu devrais sortir, voir du monde.»
« Tu ne manges pas équilibré, tu vas avoir des carences. C’est pour ça que tu es fatiguée.»
« Pourquoi tu stresses pour ça ? Y’a pas de quoi.»
« Il faut apprendre à vivre avec les autres, tu ne peux pas faire toujours à ta façon.»
« Fais un effort, tout le monde s’adapte.»

Des critiques, il y en avait tous les jours.
Et la norme allait toujours dans leur sens. Alors je luttais pour y rentrer, pour ne pas être jugée.
J’avais un grand besoin de reconnaissance.

Un cerveau épuisé

Après 40 ans d’errance diagnostique, j’ai enfin mis un mot sur ma différence.
Mais toutes ces injonctions, je les entends encore. Elles sont incrustées dans ma tête, comme les bruits extérieurs qui m’agressent. Elles épuisent mon cerveau.

Quand je me concentre sur une tâche qui compte beaucoup pour moi, tous ces bruits et ces pensées disparaissent. Mon cerveau est libre, occupé, concentré.
Mais ce moment a toujours une fin. Et tout revient : les sons, les lumières, les sensations… et surtout ces pensées forgées depuis 40 ans.

J’ai beau essayer de les taire, je n’ai malheureusement pas de casque anti-bruit pour les arrêter. Quelques antidépresseurs aident un peu, mais pas assez.
Après 10 ans de diagnostic, ces injonctions sont toujours là. Elles contribuent énormément à mon état de fatigue chronique. Un fond sonore permanant au fin fond de ma tête. Le doute, la peur de mal faire, « trop » hors norme est toujours là. Le manque de confiance en moi installé depuis bien trop longtemps.

L’importance du diagnostic précoce

Tout cela pour dire que je crois vraiment qu’un diagnostic précoce est essentiel.
Plus tôt on comprend nos différences, plus tôt on peut les expliquer, ne pas culpabiliser, et éviter d’intégrer cette souffrance au plus profond de nous.

Merci au groupe et aux réalisateurs du film pour avoir ouvert cet espace où je peux déposer un peu de tout ça.
Et merci à ceux qui me liront.

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